Visite de lieux saints : Chapelle des Pénitents bleus à Montpellier

Publié le 17 février 2010, mise à jour le 26 juin 2010


Bonjour mes amis,

Nous allons profiter de cette période hivernale pour découvrir les églises de notre belle ville qu’est Montpellier. Aujourd’hui, je vous donne rendez-vous, rue des Etuves, pour visiter la chapelle des Pénitents Bleus.

La Chapelle des Pénitents Bleus a été édifiée vers 1843 tout à côté de la première chapelle construite en 1746 sur un terrain acheté par les Pénitents Bleus. Ce bâtiment de style gothique fut commencé aussitôt et fut terminé par l’érection au pinacle de la statue de l’Immaculée Conception, patronne du lieu. Ce lieu de culte est devenu très populaire (du fait aussi de sa situation géographique). Dès l’ouverture de l’église, l’abbé Martin (de l’église de St Denis) y prêcha l’octave de l’Immaculée Conception.

Cette chapelle abrite de très belles oeuvres comme le Christ en marbre blanc de Carrare, ainsi qu’une figure de Sainte Madeleine au pied de la Croix, avec en fond la ville de Jérusalem ( marbre de Portor et jaune de Naples - qui fut commandé à un sculpteur de Carrare, prêtre de son état, Dom Cibei) ; les deux coquilles servant de bénitiers, rendues en 1816 par M. le Comte de Floirac, Préfet de l’Hérault, alors qu’elles étaient déposées depuis la Révolution au musée des Arts ; un tableau peint par Ranc (père), représentant Jésus sur la Croix, d’un côté la Sainte Vierge, de l’autre Saint Pierre et Paul , et d’autres oeuvres qui ont été classées à l’inventaire des monuments historiques.

Des chapelles latérales sont consacrées :

- à droite de l’autel à la Vierge Immaculée Conception. On y trouve aussi les statues du Sacré Coeur de Jésus, Ste Thérèse de L’Enfant Jésus et Jeanne d’Arc, ainsi que le cadre de Ste Marie du Perpétuel Secours.
- à gauche de l’autel à Saint Claude qui est entouré des statues de St Joseph et Jésus enfant et Saint Expédit. Dans son prolongement se trouve celle dédiée à Sainte Rita, entourée de très, très nombreux ex-voto. A l’opposé de l’autel, au fond, se trouvent les statues de St Roch et du Padre Pio au dessus desquels est posé l’étendard des Pénitents Bleus

Cette chapelle des Pénitents bleus abrite également, dans sa crypte, la dépouille de la Comtesse de Montolon et de M. et Mme Sabatier d’ Esperan ; Mais sa vrai richesse réside dans le fait qu’elle est constamment ouverte à la piété des fidèles qui viennent, notamment, prier Sainte Rita et le Padre Pio.

Pour bien appréhender l’histoire de cette chapelle, vous trouverez ci-après des explications relatives d’une part, à l’origine des confréries de Pénitents et d’autre part à la création de la Dévote et Royale Compagnie des Pénitents Bleus de Montpellier.

Origine des confréries de Pénitents :

Le mot pénitent vient du latin paenitens qui est le participe présent du verbe paenitere : se repentir. C’est l’état d’une personne qui se présente au prêtre pour confesser ses péchés et recevoir le sacrement de pénitence.

Au IVè siècle, il y avait quatre catégories de pénitents :
- les pleurants : qui restaient à la porte de l’église
- les écoutants : qui restaient dans le vestibule
- les prosternés avec les catéchumènes : qui n’assistaient qu’à la première partie de la messe
- les consistants : qui se mêlaient aux fidèles mais ne pouvaient participer à l’Eucharistie.

La pénitence publique fut remplacée ensuite par des aumônes ou des fondations pieuses. Au Vè siècle, voire même plus tôt, des hommes et des femmes, célibataires ou mariés, se regroupent et adoptent les conditions de vie imposées par la discipline canonique aux pêcheurs publics officiellement réconciliés :
- port d’un habit spécial
- pratique régulière de la prière
- plus stricte observance de l’abstinence et du jeûne
- renoncement aux fêtes mondaines.

C’est au XIIIè siècle que naquirent les ordres mendiants : leur règle imposait la pauvreté, non seulement des individus, mais des couvents. Le concile de Trente permit aux ordres mendiants d’acquérir des revenus, tout en maintenant l’interdiction de faire des bénéfices ecclésiastiques. A cette époque, Saint François d’Assise et ses premiers disciples se nomment "les pénitents d’Assise" avant de se constituer en ordre religieux proprement dits. En 1209, St François instituait le premier tiers Ordre séculier(dit le Saint François). Constitué de laïques, hommes et femmes, ce tiers Ordre est une sorte de congrégation civile dont les membres, tout en vivant dans le monde, même dans le mariage, s’obligeaient à mener une vie vraiment chrétienne et à observer la règle de St François, autant du moins que les exigences de la société pouvaient le leur permettre.

Du point de vue religieux, les membres de ces confréries étaient soumis aux mêmes pratiques que les moines, chantaient les mêmes offices, suivaient les mêmes rites et exerçaient à l’égard les uns des autres des principes de solidarité uniquement basés sur la foi chrétienne.

Très tôt, ils se consacrèrent aux bonnes oeuvres : la charité d’abord, soit par simples aumônes, soit par fondation puis , après, la charité orientée vers les autres pénitents, charité interne qu’est l’entraide mutuelle. De toute les obligations de charité, la principale était l’aide apportée à un pénitent au moment de sa mort, aide morale pour l’aider au passage dans l’au-delà, et l’une des obligations les plus suivies par les pénitents, et la mieux réglée était celle qui s’exerçait à l’occasion des obsèques , les pénitents s’obligeant à porter en terre leurs confrères décédés.

Plus tard, ils se chargèrent également d’ensevelir les morts non pénitents. L’égalité des frères se montrait surtout concrètement par le port de l’habit de pénitent qui leur servait d’uniforme dans les processions et lors des manifestations culturelles.

Il existe encore aujourd’hui des confréries de pénitents dans le midi de la France, en Italie, en Espagne et en Belgique. Ces pénitents ont tous une même rite et portent un habit similaire composé du sac (la livrée), et de la cagoule ou du camail et du cordon.

Les confréries n’ont-elles que des hommes comme membres participants ? NON, les femmes sont admises dans certaines confréries, notamment celles des Pénitents blancs de Mèze en 1808, des Pénitents Gris d’Aigues Mortes dans laquelle on dénombrait 24 femmes entre 1796 et 1815, 18 entre 1892 et 1933, et, plus récemment, celle des Pénitents Noirs de Nice. Les femmes participent plus particulièrement aux actions de bienfaisance des confréries et à leurs activités chrétiennes.

Mais comment devient-on Pénitent ? Par cooptation, par tradition familiale ou régionale. Nul n’est membre par sa fonction, par son âge ou par son métier, mais seulement parce qu’il l’a voulu. A Aigues Mortes, l’aîné de chaque génération était tout naturellement désigné pour prendre la suite de son prédécesseur.

La Dévote et Royale Compagnie des Pénitents Bleus de Montpellier : (d’après les notes de Philippe Becqué - Vice Prévôt de la Dévote et Royale Compagnie des Pénitents Bleus de Montpellier - en date du 18 mai 2007) -

La grande majorité des Confréries des pénitents s’est développée à partir de la Contre-réforme. Cette institution s’est installée dans les moeurs languedociennes et provençales à compter de cette période, mais elle remonte à des temps plus anciens, ce qui est le cas de la Dévote et Royale Compagnie des Pénitents Bleus de Montpellier.

La naissance officielle de la Confrérie remonte à 1040, période à laquelle Arnaud Ier occupait le siège épiscopal de Maguelonne.

Monseigneur Arnaud (évêque de Maguelonne) décide d’affecter à une association laïque, qui desservait l’hôpital et qui était également chargée d’offrir à Dieu des prières pour les âmes des personnes inhumées dans le charnier de la Charité St Barhélemy, une chapelle particulière, la chapelle Saint Claude.

La confrérie remplit sa mission, sans incident notable, pendant cinq siècles. Les services qu’elle rend sont appréciés de tous et de nombreux fidèles, et non des moindres, comme Guilhem V, seigneur de Montpellier et ses deux fils, vont à elle.

La Confrérie recueille de nombreux legs et finit par acquérir une telle importance, qu’elle peut construire pour elle seule une grande église : Notre Dame du Charnier et Saint Claude, qui fut consacrée en 1481 par Mgr Jean de Bonail , éveque de Maguelonne, qui donne à la confrérie ses premiers statuts.

Mais en 1568, les protestants pillent et rasent une soixantaine d’édifices religieux de Montpellier. L’église Notre Dame du Charnier ne fait pas exception. Les pénitents privés de leur église sont réduits à se cacher et à cesser toute activité durant cette période.

La proclamation de l’Edit de Nantes ramena la paix pendant quelques temps dans la cité.

Par une ordonnance du 10 semptembre 1601, Mgr Guitard de la Rate, évêque de Montpellier, autorisa l’ancienne confrérie St Claude à officier dans l’église de St Firmin. Pour faire cesser cette situation précaire la confrérie obtint des religieux de la Trinité installés en l’église St Paul, de faire construire à ses frais, une chapelle sous l’invocation de Notre Dame et de St Claude. Mais hélas, les réformés se révoltent à nouveau et entreprennent le saccage et la démolition de toutes les églises.

Saint Paul fut détruite et la confrérie se trouva de nouveau sans asile religieux. Après bien des péripeties, le retour de la Confrérie "intra-muros" constitue le début d’une nouvelle ère.

Laissant derrière elle la séculaire Chapelle St Claude et le cimetière St Barthelemy, la confrérie comprend qu’une partie de son histoire et tournée. Mgr Lazare Berger de Charancy, trouva légitime ce désir de retour en ville et pour bien souligner le fait que la Confrérie n’avait plus de part au service du charnier, il décide de transformer l’antique Confrérie de Saint Claude, en DEVOTE CONFRERIE DES PENITENTS BLEUS. L’ordonnance épiscopale date du 20 février 1746.

Le choix de la couleur bleue, peut s’expliquer par l’influence du rayonnement de la confrérie des Pénitents Bleus de Toulouse, mais aussi parce que la Confrérie était royale et qu’elle avait accueilli Louis XIII et Louis XIV. En outre les couleurs ont une symbolique propre :

"Le noir, couleur de deuil et des larmes exprime la Sainte Tristesse, qui accompagne la pénitence" "Le bleu, couleur du ciel, révèle la consolation qu’elle engendre" "Le blanc couleur de l’innocence, la pureté qu’elle acquiert" "Le gris couleur de travail, la mortification qui la suit".

Un an après l’ordonnance, le Parlement de Toulouse, par acte du 5 juillet, valida la constitution des statuts, fixa la forme du sceau de la Compagnie et de ses armoiries et lui concéda le nom de "Royale".

La confrérie connut alors un demi-siècle de tranquillité et put se croire revenue à l’époque bénie de ses origines. Elle retrouva son prestige et les plus illustres personnages tinrent à en faire partie : le Maréchal de Richelieu, l’archevêque prince de Cologne, Monsieur futur Louis XVIII, le duc et la duchesse de Parme, le cardinal Jean Théodore, Prince évêque de Liège, le cardinal de Bernis, archevêque d’Albi qui fut prévôt de la Confrérie, le duc de Lorraine qui lui succéda à cette charge et tant d’autres dont les archives ont conservé le souvenir, célèbres ou inconnus, puissants ou misérables, tous confondus sous le même sac et unis par une foi commune.

Mais, la Révolution Française allait interrompre pour quelques années cette trop paisible existence. La Confrérie est dissoute et son Grand Prévôt décapité quelques jours avant la fin de la terreur. Les pénitents sont dispersés et leur chapelle est confisquée et vendue comme bien national.L’acquéreur, spéculateur en entreprend immédiatement la démolition.

Quelques oeuvres d’art sont heureusement sauvées : ciboires, bâtons de pénitents, tableaux et le Christ de Dom Cibei.

L’orage s’apaise et les confrères fondent une société par actions et achètent une très belle chapelle, celle des religieux de la Merci, aujourd’hui l ’église Sainte Eulalie, proche du Peyrou, qui était depuis la Révolution .......un entrepôt.

Le 25 décembre 1803, la Compagnie reçoit Son Excellence Ferdinant Joseph Herman Antoine HOMPESE, dernier Grand Maître de l’Ordre de Malte, chassé de son Ile par Bonaparte. Mort à Montpellier, sa dépouille fut déposée le 14 mai 1805, dans l’un des caveaux de l’Eglise des Pénitents Bleus (Eglise Ste Eulalie). La ville étant sans paroisse de ce côté de la cité et pour faciliter l’exercice du culte, la Compagnie mis gratuitement sa chapelle à la disposition de son évêque, tout en gardant la propriété de l’édifice tout entier, se réservant pour son service, une chapelle.

Mais un conflit va éclater avec le curé de Ste Eulalie et les différents actionnaires. De nouveaux procès, qui iront jusqu’en cassation, sont intentés par la Compagnie. Celle ci les gagne, mais décide malgré tout de vendre la chapelle aux enchères. Ce fut la Ville de Montpellier qui l’acheta. Pour la cinquième fois au cours de leur longue histoire, les Pénitents Bleus de Montpellier se trouvent sans abri.

C’est alors qu’ils achetèrent un terrain à l’angle de la rue des Etuves et de la rue Lyos, tout à côté de l’endroit où ils avaient édifié leur chapelle en 1746. Ils y bâtirent la chapelle qui les abrite toujours.

La Dévote et Royale Compagnie des Pénitents Bleus de Montpellier, vit aujourd’hui, que grâce aux dons et legs qu’elle reçoit, elle ne perçoit aucune aide des collectivités publiques.

Cette chapelle située au centre de la ville, tout prêt de la Place de la Comédie, attire toujours autant de fidèles et de visiteurs, aussi si vous vous trouvez dans sa périphérie n’hésitez pas à y entrer.

A bientôt.


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